Wikipédia pratiquerait-il la censure politique ?

  
censure wikiEn moins de vingt années, une révolution numérique s’est engagée, portant en elle la possibilité non seulement d’émanciper les hommes de l’ignorance en toutes choses, mais aussi de pouvoir améliorer le niveau de démocratie grâce aux réseaux sociaux. Ces derniers posant en effet les premiers socles d’une démocratie directe s’institutionnalisant, sans que nos politiciens s’en rendent vraiment bien compte. Une multitude de sites internet permettent désormais à la population de se cultiver au-delà de ce que l’enseignement scolaire ou le bruit médiatique nous jettent en pâture pour orienter le champ de nos connaissances.

Ainsi en est-il de ce formidable projet qu’est Wikipédia, créé en 2001 par les Américains Jimmy Wales et Larry Sanger. Cette encyclopédie libre rédigée en plus de 287 langues, est enrichie continuellement par les internautes eux-mêmes en fonction d’un cahier des charges censé garantir une information neutre et objective.

Du fait de sa progression rapide partout dans le Monde, Wikipédia s’est décentralisé avec des administrateurs dans chaque pays qui sont au nombre de 176 en France, la majorité sous pseudonyme.

Leur rôle est modérer, supprimer, restaurer ou protéger une page Wikipédia créée ainsi que les commentaires des contributeurs donnant leur avis ou suggestion sur la création d’une page.

Le fait que ces administrateurs bénéficient du droit d’anonymat pose un réel problème de neutralité comme nous allons le voir avec l’exemple de l’U.P.R, parti politique préconisant la sortie de l’Union Européenne, l’euro et l’OTAN sans vouloir se positionner sur des thématiques sociétales divisant la gauche et la droite.

francois-asselineau-4a8f1Fondée le 25 Mars 2007 par François Asselineau, Inspecteur Général des Finances à Bercy et ancien délégué à l’intelligence économique, l’Union Populaire Républicaine est désormais un parti politique bien installé en France, revendiquant 6118 adhérents à l’heure de la rédaction de cet article.

Akira Aubert, responsable du « cyber militantisme » de ce parti politique, relate dans un article publié sur le site de l’U.P.R, que la première tentative de publier une page wikipédia présentant cette formation politique s’est soldée par un échec en 2008.

Explications :

« Docteur Cosmos », administrateur anonyme du site a refusé l’article du fait que les « critères d’admissibilité n’étaient pas respectés ».

Ces critères sont dans l’ordre :

  • La multiplicité des sources primaires (médias, livres)
  • La multiplicité des sources secondaires (sources citant les sources primaires)
  • Une notoriété pérenne (les sources restent visibles et croissent durant au moins deux ans)
  • La qualité des sources (élément très subjectif pour faire valoir la fiabilité de la source)
  • Indépendance du contributeur (les contributeurs ne peuvent être liés à la chose ou personne présentée dans l’article)

    Ainsi Wikipédia mentionne la phrase suivante pour mieux étayer la nécessité de se mettre en adéquation avec le cahier des charges cité plus haut :

    L’exigence du respect strict de ces critères – notamment l’existence, demandée ci-dessus, d’au moins deux sources secondaires indépendantes et fiables, en principe d’envergure nationale ou internationale, espacées d’au moins deux ans et centrées sur le sujet – devra être d’autant plus forte que l’article envisagé pourra présenter un intérêt promotionnel pour son sujet (promotion d’intérêts commerciaux, politiques ou autres, soutien d’une notoriété naissante, satisfaction de l’ego d’une personne, d’un groupe ou d’une organisation…).

    Évaluons les images ci-en dessous la pluralité des sources que peut proposer l’U.P.R pour garantir sa notoriété à un niveau national et une certaine pérennité de citations.presse_upr_2-409x600 presse_upr-493x600Le moins qu’on puisse dire, cela sans compter les multiples conférences données partout en France par François Asselineau, les sources médiatiques sérieuses ne manquent pas.

    En 2012, avec le développement de la notoriété de cette formation politique, les responsables de l’UPR retentent leur chance, avec toujours les mêmes déconvenues pour les mêmes motifs. Guillaume Champeau, fondateur du journal Numérama remarque cet étrange acharnement des administrateurs de Wikipédia à l’encontre de l’UPR, et rédige alors un article sur la situation. Guillaume Champeau note :

    « Les partisans de la suppression de la page sont actuellement largement majoritaires, avec plus d’une soixantaine d’avis exprimés contre le maintien de la page, contre moins d’une dizaine d’avis favorables à sa conservation. Pour voter, il faut compter au moins 50 contributions dans l’encyclopédie ».

    antifa-virtuel3Ce qui permet de s’interroger sur QUI forme la communauté des contributeurs les plus « enthousiastes » ? En effet, si rédiger un article Wikipédia après un minutieux travail de vérification et croisement des sources, de renvoi vers des liens, etc. peut être une tâche bénévole surmontable pour tout un chacun, répéter la même procédure sur plus de 50 publications peut être considéré comme un travail à plein temps ! Or, il faut bien vivre et soit la majorité des contributeurs sont rémunérés pour ce travail par une entité autre que Wikipédia, soit nous avons à faire à une communauté bénévole, mais visiblement réunie autour d’un certain nombre d’idéaux politiques.

    François Asselineau, pour sa part s’amuse un peu de la question en citant régulièrement l’exemple caricatural de la page Wikipédia du « Parti du Plaisir », dont la Présidente Cindy Lee se baladait sur les marchés les seins nus pour faire propagande devant les caméras de TF1 lors de la dernière campagne présidentielle, et qui aurait ainsi acquis une notoriété nationale suffisante de ce fait pour les administrateurs.

    La bouffonnerie étant grossière sachant que personne ne connaît le Parti du Plaisir autrement que par l’épiphénomène qu’il représente lors des élections présidentielles, alors que l’U.P.R dont le programme extrêmement sérieux déroulé sur plus de six heures, a bénéficié de plus de 50.000 vues Youtube mériterait tout à fait une page Wikipédia.

    Cette étrange partisanerie à double sens des contributeurs de Wikipédia ne s’est pas faite remarquer que sur le seul cas de l’U.P.R. Ainsi, comme en témoigne le bloggeur Hamelin de Guettelet sur son site « ainsi va Wikipedia », nombre de contributeurs finissent lassés par le diktat imposé par les contributeurs les plus réguliers sur leurs propres soumissions d’articles :

    Alors que Bzh-99 posait cette question : « A-t-on des statistiques sur le motif de départ des utilisateurs ? », j’ai relevé un autre comportement incompréhensible de Cobra bubbles qui a l’habitude de piloter un peu trop vite sa souris, n’est pas bon pilote qui veut ou qui rêve de l’être. En l’occurrence, Michel d’Auge a apparemment mis de l’ordre dans ses pages et sous-pages avant de quitter Wikipédia. Entre autre, il s’était inscrit dans une catégorie qu’il avait lui-même créée « Utilisateur ayant définitivement quitté Wikipédia », ce qui pouvait éventuellement être intéressant pour avoir justement une idée de ces départs volontaires de Wikipédia. Il existe déjà une foultitude de catégories pour classer les Wikipédiens, une de plus ou une de moins, ne posait aucun problème sauf apparemment à Cobra bubbles qui s’est empressé de supprimer sans la moindre concertation cette catégorie qui aurait pu être utile pour avoir un début d’information sur les partants. Comme partant moi-même, je me serais bien catégorisé ainsi, j’aurais été certainement en bonne compagnie. Mais non, il est des contributeurs qui se permettent d’imposer leurs point de vue partisan sans la moindre explication, si cela est courant chez certains contributeurs, cela devient de plus en plus régulier chez certains administrateurs (Lomita, Starus et Cobra bubbles en l’occurrence).

    Sur le blog Wikibuster, on trouve un autre commentaire désabusé pointant du doigt cette partisanerie des administrateurs du site :

Il y a longtemps les administrateurs de Wikipédia, qui se faisaient appeler des balayeurs, répétaient qu’ils n’avaient aucun pouvoir et qu’ils n’étaient là que pour « appliquer les décisions de la communauté ». […] De nos jours les administrateurs sont élus à vie et ils sont tout puissants, ils décident du moindre contenu de Wikipédia comme de décider qui a le droit d’émettre une simple opinion.

Le 4 février 2014, des sympathisants de l’U.P.R retentent à nouveau leur chance avec toujours les mêmes déconvenues. La communauté Wikipédia maintient sa censure avec un jusqu’au-boutisme à toute épreuve. Cependant, les publications de certains journalistes et bloggeurs devenant de plus en plus critiques sur la partisannerie de la communauté Wikipédia va générer à l’endroit de l’UPR une réaction inattendue :

Le 29 septembre 2014 apparaît une page dédiée au Président de l’UPR rédigée par un certain Pierre Carles Langlais qui entame son article comme suit :

Apparenté aux souverainistes, il est également rangé par divers médias parmi les conspirationnistes; Arrêt sur images le présente comme un « énarque de droite, aux lisières de l’extrême-droite ». Lors des élections européennes, sa liste est classée parmi les « divers », sans précision d’orientation politique.

Il est également connu pour ses relations avec les médias en général et incidemment avec la version francophone de Wikipédia dont les contributeurs ont, à plusieurs reprises, jugé sa notoriété insuffisante pour lui consacrer une page. Beaucoup de ses partisans ont « harcelé » les médias pour qu’ils lui prêtent plus d’attention.

L’auteur est l’un des rares contributeurs à révéler son nom et son activité. Il est doctorant en « science de l’information et de la communication ». Peut-être cela permettra-t-il de mieux comprendre cette présentation excessivement orientée de François Asselineau. Car ce dernier n’est ni « souverainiste », ni « conspirationniste », pas plus qu’il n’est « d’extrême droite ».

Il n’est pas souverainiste car François Asselineau se contente de respecter le premier alinéa de l’article 4 de la Constitution qui dispose :

Les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. 

Ce n’est pas par ce que l’ensemble des partis politiques ultra médiatisés violent impunément la Constitution en nous imposant une « construction européenne » à laquelle la majorité des Français est très hostile, que le fait de respecter la constitution fait de quelqu’un un « souverainiste ». D’ailleurs dit-on des dirigeants de l’Islande, de la Norvège, du Venezuela ou de la Nouvelle Zélande qu’ils sont « souverainistes » sous prétexte qu’ils respectent la Souveraineté de leur pays ? Disait-on de François Mitterrand ou Valery Giscard d’Estaing qu’ils étaient « souverainistes » alors que la France n’avait pas encore vu des pans importants de sa Souveraineté disparaître dans le Traité de Maastricht ?

François Asselineau n’est pas non plus « conspirationniste ». Arguments très solides et sourcés à l’appui, il explique dans ses conférences que la « construction » européenne relève d’un projet au départ Américain, financé notamment par la CIA durant les années 50 à 60. Il en explique les raisons géopolitiques et économiques fondamentales, et un très grand nombre de politologues, géopoliticiens ou économistes expliquent la même chose. Si à minima, François Asselineau qui rappelons-le, est un haut fonctionnaire ayant travaillé à l’intelligence économique, ne sourçait pas ses déclarations, nous pourrions parler de conspirationnisme. Tel n’est pas le cas. On peut tergiverser sur les propositions qui découlent de ses analyses, mais difficilement remettre en cause celles-ci, lorsque même les documents officiels déclassifiés du Département d’Etat des Etats-Unis d’ Amérique, corroborent les informations données.

François Asselineau n’est pas non plus d’extrême droite. S’il reconnaît à titre personnel être plus sensible à certains points de vue débattus à droite, son programme politique est de l’avis de nombreux observateurs plutôt à gauche, du fait qu’il reprend et met à jour la totalité du programme du Conseil National de la Résistance, à tel point que plus de 60 % des adhérents de l’UPR se revendiquent de gauche. En vérité, on pourrait dire – bien qu’il s’en défende – qu’Asselineau est plutôt un Gaulliste.

Enfin, au vu de la censure pratiquée par Wikipedia, il n’est pas étonnant qu’un parti politique fort de 6000 adhérents (soit plus qu’au N.P.A par exemple) et ayant réuni près de 80.000 votants lors des élections européennes, puisse susciter une certaine indignation de nombreux internautes sur une telle partisannerie de Wikipedia.

Car si ce site internet n’était que très peu consulté, il n’y aurait pas matière à s’en émouvoir. Cependant, Wikipedia est devenu avec le temps la toute première source d’information consultée par les internautes lorsqu’ils cherchent à se renseigner sur une personne morale ou physique disposant d’une certaine notoriété.

La dernière bouffonnerie pratiquée par Wikipedia pour répondre aux récriminations des partisans de l’UPR sur sa censure témoigne très clairement d’une volonté de nuire, à défaut de pouvoir censurer complètement.

La question en vérité est importante, particulièrement dans un pays qui se veut démocratique. Car lorsque quelques dizaines de personnes deviennent anonymement et à vie, les seules à même de décider qui peut exister sur une encyclopédie en ligne très consultée, et comment ; on ne peut au seul nom de l’indépendance de l’éditeur se refuser à tout débat sur la transparence concernant l’administration du site.


Il y a visiblement un grave problème d’indépendance éditoriale parmi les équipes en charge d’accepter ou non les publications proposées par les internautes, ce qui suppose qu’une grande partie du contenu de cette encyclopédie en ligne est sans doute lui-même orienté d’une certaine façon, en dépit du cahier des charges sur la neutralité exigée…

  

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