Le Transport Français sous le joug de l’Union Européenne

  

337384_des-camions-au-peage-d-une-autoroute-a-biriatou-a-la-frontiere-franco-espagnole-en-2002Il y’a un mot qui suscite de la colère chez les chauffeurs routiers quand on leur en parle : Il s’agit du cabotage.

Le cabotage est la possibilité pour une entreprise de transport d’un pays tiers, de fournir sa prestation de service sur le marché intérieur d’un pays autre que le sien.

Le règlement européen 1072/2009, organise ce cabotage, notamment dans son article 8  qui édicte :

« 1. Tout transporteur de marchandises par route pour compte d’autrui qui est titulaire d’une licence communautaire et dont le conducteur, s’il est ressortissant d’un pays tiers, est muni d’une attestation de conducteur, est admis, aux conditions fixées par le présent chapitre, à effectuer des transports de cabotage.

2. Une fois que les marchandises transportées au cours d’un transport international à destination de l’État membre d’accueil ont été livrées, les transporteurs […] sont autorisés à effectuer […] jusqu’à trois transports de cabotage consécutifs à un transport international en provenance d’un autre État membre ou d’un pays tiers à destination de l’État membre d’accueil. Le dernier déchargement au cours d’un transport de cabotage avant de quitter l’État membre d’accueil a lieu dans un délai de sept jours à partir du dernier déchargement effectué dans l’État membre d’accueil au cours de l’opération de transport international à destination de celui-ci.

Dans le délai visé au premier alinéa, les transporteurs peuvent effectuer une partie ou l’ensemble des transports de cabotage autorisés en vertu du dit alinéa dans tout État membre, à condition qu’ils soient limités à un transport de cabotage par État membre dans les trois jours suivant l’entrée à vide sur le territoire de cet État membre.”

Évidemment, si tous les salariés des États-Membres de l’U.E disposaient des mêmes taux horaires de travail (et tant qu’à faire, pas ceux de la Bulgarie) et du même niveau de protection sociale, le fait d’autoriser le cabotage ne serait en soit pas très grave. La concurrence resterait globalement loyale, encore qu’il faudrait aussi dans ce cas que la fiscalité sur les entreprises soit la même d’un pays à l’autre.

Mais lorsqu’un chauffeur Bulgare peut être payé 138 € (Smic local) là où un chauffeur Français verra son minimum légal osciller autour de 1300 €/net, il est évident que la concurrence est déloyale. Ainsi, une entreprise Parisienne cherchant à faire acheminer de la marchandise vers Marseille, recevra forcément des devis très différents entre une entreprise de transport Française et une entreprise de transport d’un autre État Membre de l’U.E. Et comme la règle étant de faire des économies partout où il est possible d’en faire pour dégager de la marge bénéficiaire, le choix du transporteur étranger sera toujours favorisé au détriment du transporteur Français. Et cela impacte évidemment sur le taux d’emploi, les niveaux de salaire et la qualité de travail des chauffeurs routiers Français.

Et le problème s’aggrave si l’on tient compte d’une publication du Ministère des transports 

En 2013 la part du cabotage en France représentait 27,5 % des transports effectués sur notre marché intérieur. Cabotage qui s’accroît fortement avec 14,4 % d’augmentation par rapport à l’année précédente. Ceci mène à la ruine totale du transport routier de marchandise en France.

En milliers de tonnes-kilomètres, l’on observe ainsi dans le même document que si l’activité du transport routier Polonais, Bulgare ou Lituanien a augmenté de plus de 10 % (notamment grâce au cabotage dans notre pays), l’activité du transport routier Français baisse pour sa part de 0,6 %

Et ces chiffres risquent bien de se dégrader encore au vu du fait que le chômage explose en France, que des records de fermetures d’entreprise ont été atteints en 2013, et que par définition, la consommation intérieure (transport inclus) des ménages et entreprises va continuer de dégringoler.

Le transport routier a été longtemps un secteur relativement préservé pour des raisons structurelles, du dumping social organisé par l’U.E. Au moment où la France entrait dans l’euro, les offres d’emploi dans le transport routier foisonnaient et étaient très diversifiées.

Aujourd’hui, ne restent pratiquement que des contrats courts (C.D.D et intérim) qui sont proposés, pour faire quasi exclusivement de la messagerie, c’est à dire la livraison de colis dans les agglomérations. Le transport de marchandises à un niveau national est peu à peu accaparé par des entreprises étrangères non soumises à notre réglementation sociale et nos salaires, pas plus qu’à la fiscalité à laquelle sont assujetties les entreprises de transport routier Françaises. Le transport en « zone longue » est pourtant celui qui est le plus recherché par les routiers en règle générale, du fait qu’il correspond d’abord à une certaine culture professionnelle (le plaisir de voyager à travers le pays, de rencontrer des gens partout en France, l’indépendance du chauffeur), mais aussi à des revenus plus élevés puisque s’ajoutent au salaire, des indemnités de déplacement relativement importantes.

La réglementation européenne est issue des travaux de la Commission Européenne, et est votée par le Conseil Européen (soit les Chefs d’État).

Ce qui signifie que non seulement nos Présidents précédents ont trahis nos intérêts fondamentaux en matière d’emploi, mais qu’ils continuent de les trahir en ne revenant pas sur cette réglementation désastreuse pour le Transport Routier Français.

Mais que font les syndicats ?

Il est intéressant de parcourir les sites des principales organisations syndicales et professionnelles du transport routier. Commençons par celle de la Fédération Nationale du Transport Routier (F.N.T.R) qui est le porte voix de la profession.

La F.N.T.R est dirigée par Jean-Christophe Pic. Fils de sénateur, Jean-Christophe Pic a exercé de hautes responsabilités dans le Groupe Charles André, qui est une entreprise de 7000 salariés répartie sur 15 pays en Europe. Le type d’intérêts que défend donc Jean-Christophe Pic est très éloigné de la réalité du Transport Routier Français, puisque toujours selon le site de la F.N.T.R, 97 % des entreprises de transport en France, sont des PME de moins de 50 salariés.

Aussi, on ne s’étonnera pas du silence le plus complet de la F.N.T.R sur ce cabotage ruinant le tissu de PME françaises, en revanche, on s’étonnera moins de voir cette organisation se désoler que :

« Les temps de travail et de conduite des chauffeurs sont les plus faibles d’Europe.

  • Seule la France paie comme temps de travail tous les temps d’attente des conducteurs.
  • Un coût de l’heure de conduite prohibitif :20 % au-dessus de la moyenne de nos principaux partenaires (2001).3 fois plus que dans les entreprises tchèques, polonaises ou hongroises.
  • 80% de la valeur ajoutée des entreprises est consacré à la fiscalité et au social.La France limite d’autant ses capacités d’innovation et d’investissement.3 fois plus de moyens sont disponibles en Italie et en Espagne pour financer le développement des entreprises, et 2 fois plus au Royaume-Uni et en Allemagne »

En clair, la F.N.T.R loin de militer pour la préservation de nos acquis sociaux, souhaite qu’on les brade pour sans doute nous mettre aux normes Bulgares ?

Quant aux organisations syndicales, n’espérez pas les entendre appeler à une grève générale des transporteurs routiers. A l’exception de SUD-SOLIDAIRES, toutes reçoivent des subsides de la Confédération Européenne des Syndicats, elle même abondée par les fonds de la Commission Européenne. On ne mord pas la main qui vous nourrit, c’est une évidence.

Le ministère du transport pour sa part ne publie que des chiffres européens, malgré le fait que le Transport Routier Français abonde le Trésor de plus de 8 Milliards d’euros de recettes fiscales. Le moins que l’on pourrait attendre du Ministère des Transport, serait qu’il publie les chiffres nationaux, en particulier s’agissant du taux d’emploi, d’activité et des créations et fermetures d’entreprises dans le transport, pour que l’on puisse juger de l’évolution de ce secteur d’activité.

Consulter les données d’autres pays européens sur le site du Ministère des Transports en France peut être intéressant pour se donner quelques éléments de comparaison, mais devient franchement insultant lorsqu’il est quasi impossible de connaître les chiffres nationaux pour les journalistes et entrepreneurs.

Ainsi donc, que ce soit au niveau ministériel, syndical ou organisations professionnelles, l’ensemble des acteurs sensés protéger les intérêts des 97 % de petites PME de transport routier en France, nous trahissent complètement.

Quand on sait que le Transport Routier est le sang de l’économie, on en vient à espérer que les patrons et salariés du secteur prennent conscience que nos représentants ont décidé de les condamner à la faillite et au chômage.

Car si cette prise de conscience avait enfin lieu, nul doute qu’une grève totale de une à deux semaines des transporteurs routiers, suffirait à faire plier le gouvernement pour qu’il nous sorte de l’Union Européenne, mais aussi qu’il abroge la réglementation organisant le cabotage, en plus de rétablir la Tarification Routière Obligatoire (T.R.O) – abrogée en 1987 – qui imposait un prix minimum du transport routier permettant aux PME de pouvoir concurrencer les multinationales du transport, telles que Norbert D’Entressangle ou encore le Groupe Charles André…

DOSSIER PLUS COMPLET A TÉLÉCHARGER ICI

  

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